1. M.D.C. – Millions Of Dead Cops (1982)
M.D.C., pour Millions Of Dead Cops, s’est formé en 1979 à Austin sous le nom The Stains, avant de se relocaliser à San Francisco dès 1982 comme beaucoup d’autres groupes texans. Leur changement de nom a été nécessaire pour éviter la confusion avec les Stains de Los Angeles, et fait un bras d’honneur à la police suite aux violences dont ils ont été victimes lors d’un d’un concert avec les Black Flag à Orange County.
Leur radicalisme politique a donné lieu à l’album Punk Hardcore le plus jusqu’au-boutiste sur ce plan : Millions Of Dead Cops, sorti en toute indépendance en 1982 via leur label R Radical Records, véhicule des idéaux sociopolitiques d’extrême gauche. Le chanteur Dave Dictor assassine le gouvernement, la police, le capitalisme et les multinationales, la culture américaine (McDonald’s, les rednecks violents, l’Eglise) et revendique la tolérance et les droits humains quel que soit l’origine et l’orientation sexuelle. Moins ironique et plus direct que les Dead Kennedys qui les soutenaient, le groupe en avait dans le pantalon !
L’offensive sans concession se retrouve également sur le plan sonore avec quatorze titres déroulés en vingt minutes, où la musique est aussi brute, rapide et efficace qu’une charge de peloton CRS. Leur Punk très politisé et intelligent leur a valu d’embarquer sur des tournées prestigieuses par exemple en Europe avec les Dead Kennedys ou aux USA sur le Rock Against Reagan Tour. Il s’y embrouilleront d’ailleurs avec les Bad Brains, le chanteur H.R. ayant fait preuve d’homophobie envers leurs voisins et amis Big Boys !
Mais leur dogme politique a finalement joué contre eux, les obligeant à varier leur nom pour faire diversion et calmer le jeu (Multi-Death Corporation, Millions Of Dead Children, Millions Of Damn Christians, etc.). L’accumulation de rumeurs et scandales, les changements de line-up à répétition et les productions ultérieures passables (jusqu’à aujourd’hui) ont finalement lassé une bonne partie de leur public.
Meilleurs titres : Business On Parade, Dead Cops, Corporate Deathburger, I Remember, John Wayne Was A Nazi, Dick For A Brains, My Family Is A Little Weird, Church And State, Kill The Light.
2. Dicks – Kill From The Heart (1983)
Les Dicks aussi ont migré d’Austin à San Francisco en 1983 au sommet de leur carrière. Créé en 1980, le groupe s’est vite fait remarqué la même année grâce à son EP Hate The Police et ses prestations scéniques particulièrement provocatrices. En effet, le chanteur Gary Floyd, bouboule à la crète blonde platine, marxiste virulent et homosexuelle assumé, apparaissait régulièrement en drag queen n’hésitant pas à jeter des poches à lavement ou des préservatifs remplis de mayonnaise à son public.
Mais c’est surtout le brulot suivant Kill From The Heart, sorti en 1983 sur SST Records (label des Black Flag), qui a propulsé le groupe toujours plus haut dans l’échelle de la reconnaissance. Et bien que partageant la même identité politique communiste et militantisme homosexuel que leurs confrères M.D.C. ou Big Boys (ces derniers d’ailleurs invités sur quelques titres), les américains se différentient par l’humour constant drainant leurs paroles extrêmes et un Punk Hardcore à l’esthétisme Blues et Country.
Un mélange très original et jubilatoire avec la musique traditionnelle du Texas, mais qui ne sera hélas pas plus exploré du fait des changements à venir de line-up et une nouvelle direction musicale plus expérimentale !
Meilleurs titres : Anti-Klan (Part One), No Nazi’s Friend, Marilyn Buck, Kill From The Heart, Little Boys’ Feet, Dicks Can’t Swim.
3. D.R.I. – Dirty Rotten EP (1983)
Qui ne connait pas D.R.I, groupe emblématique de Crossover Thrash encore en activité de nos jours ? Il faut remonter en 1982 à Houston pour découvrir la genèse des Dirty Rotten Imbeciles et les prémices d’un nouveau genre de Punk hardcore !
Formé sur les cendres des Suburbanites autour de Spike Cassidy à la guitare, Kurt Brecht au chant, Eric Brecht aux fûts et Dennis Johnson à la basse, le combo a tiré son nom des foudres parentales lors des répétitions à domicile (« bande de sales imbéciles pourris »).
Après seulement quelques mois d’existence, D.R.I a enregistré et sorti l’EP séminal Dirty Rotten sur son propre label du même nom. Du Do It Yourself pur jus jusqu’au modèle au crâne rasé utilisé sur l’artwork qui n’est autre qu’Eric Brecht ! C’est d’ailleurs aussi lui qui est à l’origine du cultissime logo « Skanker Man » réalisé dans le cadre d’un exercice artistique universitaire.
Cet album était terriblement en avance sur son temps, et le groupe très singulier et précurseur par son obsession de la vitesse et de la concision. Visez un peu : seize minutes, vingt-deux titres au tempo frénétique positionnant longtemps le disque comme le plus rapide de l’histoire du Hardcore !! Mais D.R.I. ne peut pas seulement être résumé à des assauts éclairs de vingt ou trente secondes, les jeunes fascinant aussi par leur dextérité à créer des refrains accrocheurs voire même des hits soutenant des thématiques adolescentes comme les parents, les camarades, l’école, la société de Reagan…
Pas une seule note redondante ou un ennui à l’horizon, juste du Punk Hardcore à son zénith : brut, rapide et direct dans la face ! Peu étaient les groupes à proposer une musique aussi intense en 1983 (F.U.’s, Siege, Drop Dead, Die Kreuzen), ce qui fera des Dirty Rotten Imbeciles les pionniers et légendes du Thrashcore / Fastcore.
Après une relocalisation à San Francisco en 1983 et des changements de line-up, le groupe a poursuivi avec le tout aussi excellent EP Violent Pacification (1984) avant de prendre la tête du mouvement Crossover Thrash jusqu’à encore aujourd’hui.
Meilleurs titres : I Don’t Need Society, Commuter Man, Balance Of Terror, Who Am I, Money Stinks, Yes Ma’am, Reaganomics, War Crimes, Capitalists Suck, Blockhead.
4. Verbal Abuse – Just An American Band (1984)
Restons du côté de Houston, Verbal Abuse a été fondé en 1981 par le chanteur Roy Hansen alias Nicki Sicki, alors seulement âgé de dix-sept ans et déjà membre des Sick Pleasure ! Après un nombre incalculable de changements de line-up, la formation stabilisée a décidé de s’installer à San Francisco où elle y rencontrera le label Punk Fowl Records.
De ce partenariat est né le premier album Just An American Band en 1984, qui fait partie de ces pièces d’excellence totalement sous-estimées par le public ! Et c’est dommage car il s’agit d’une bombinette Punk Hardcore : douze chansons exécutées en seize minutes, un feeling Thrash Metal, à l’hostilité et au nihilisme exacerbés loin des charges politiques habituelles.
Du tout bon qui a permis à Verbal Abuse d’embarquer dans la foulée sur une tournée nord-américaine de quatre mois avec Slayer, The Ramones, Agnostic Front, Cro-Mags, Dead Kennedys ou Poison Idea pour ne citer qu’eux. Slayer a même d’ailleurs repris cinq des titres sur son album Undisputed Attitude (1996).
Sicki a fini par quitter Verbal Abuse en 1985 suite à des divergences stylistiques et créatives, puis par monter le clone Afterbirth.
Meilleurs titres : Leeches, I Hate You, Boredom, Disintegration, Unity, Free Money, Verbal Abuse.
D’autres groupes et albums ont également participé à l’émergence du Punk Hardcore dans le Texas :
- M.D.C. avec Multi-Death Corporations (1983) et Millions Of Dead Children (1984)
- Offenders, les petits protégérés de M.D.C., avec We Must Rebel (1983), I Hate Myself (1984) et Eternal Struggle (1985)
- D.R.I. avec Violent Pacification (1984)